Songe à la douceur - Clémentine Beauvais

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Titre: Songe à la douceur

Auteur: Clémentine Beauvais

Traducteur: /

Editions: Sarbacane

Collection: Exprim'

Parution: 24 août 2016

Prix: 15.50


Ma citation favorite: "Qu'est-ce que c'est con l'adolescence.
Qu'est-ce qu'on est con."








Quatrième de couverture:
Quand Tatiana rencontre Eugène, elle a 14 ans, il en a 17 ; c’est l’été, et il n’a rien d’autre à faire que de lui parler. Il est sûr de lui, charmant, et plein d’ennui, et elle timide, idéaliste et romantique. Inévitablement, elle tombe amoureuse de lui, et lui, semblerait-il… aussi. Alors elle lui écrit une lettre ; il la rejette, pour de mauvaises raisons peut-être. Et puis un drame les sépare pour de bon. Dix ans plus tard, ils se retrouvent par hasard. Tatiana s’est affirmée, elle est mûre et confiante ; Eugène s’aperçoit, maintenant, qu’il la lui faut absolument. Mais est-ce qu’elle veut encore de lui ? Songe à la douceur , c’est l’histoire de ces deux histoires d’un amour absolu et déphasé – l’un adolescent, l’autre jeune adulte – et de ce que dix ans à ce moment-là d’une vie peuvent changer. Une double histoire d’amour inspirée des deux Eugène Onéguine de Pouchkine et de Tchaikovsky – et donc écrite en vers, pour en garder la poésie

Avis:
Cela fait maintenant une heure que je suis plantée devant mon écran à essayer de trouver les mots pour vous parler de Songe à la douceur de Clémentine Beauvais. Comment rendre justice à une telle oeuvre ? Je n'ai jamais lu quelque chose comme ça, ma lecture a été unique et je ne pense pas relire quelque chose dans ce genre avant longtemps.

"Leur quatre yeux produisirent un regard épais et élastique comme une liane de guimauve mauve
Et sous leffet de ce moment Dame Tartine, d'interminables carambars pousserent comme des roseaux dans le salon désordonné
Et des souris de sucre naquirent sous des nuages de barbapapa
Et tous les petits mots d'amour prononcés dans cette pièce resonnerent en une averse de Smarties."

Commençons par le commencement. On suit les retrouvailles d'Eugène et de Tatiana au détour d'une ligne de métro. Lorsqu'ils se sont connus, ils étaient adolescents. Tatiana semble être amoureuse d'Eugène. Lorsqu'ils se retrouvent, ils sont adultes. Les rôles semblent s'être inversés. Ils se remémorent alors leurs souvenirs de l'été de leur première rencontre. On pense alors assister à la renaissance d'une histoire d'amour passée, oubliée tout en douceur avant que celle-ci ne devienne tiraillement. L'un souhaite reconquérir l'autre et l'autre veut s'en protéger. Ainsi, Clémentine Beauvais pose des questions existentielles dont personne n'a la réponse exacte.

"on peut pas faire l’amour debout quand on est amoureux,
ça va pas ou quoi, la verticalité ne va plus de soi,
quant on est amoureux,
quand quelqu’un est allé nous voler dans notre ventre
le centre de gravité qu’on y gardait."

On suit donc les réflexions des deux protagonistes qui sont accompagnées par un narrateur exceptionnel. J'ai trouvé qu'il apportait beaucoup au roman. C'était comme si l'on me contait cette merveilleuse histoire, j'ai adoré cette sensation qui m'a rappelé l'enfance. Autre point qui m'a fait sourire: les références aux années 2006 avec Msn, Skyblog, Dromadaire.fr, ça m'a encore une fois rappelé quand j'étais plus jeune. Un étrange mélange se forme puisque ces références sont associées à Caillebotte, Laurent Binet ou encore Tchaivoski.

"Pourquoi voudrait-on reconnaître ses pensées
dix ans plus tard
quand le miroir nous montre bien qu’on a changé ?
On place plus haut nos idées
que notre visage, on se dit
qu’elles ne changeront jamais, nos pensées platine,
nos inoxydables promesses
(…)
Là où le présent caresse,
plus tard le passé pince"

Durant toute ma lecture, j'ai eue la sensation de vivre l'histoire d'amour d'Eugène et Tatiana ce qui a été à la fois déroutant et magique. On en vient à se demander ce que nous ferions si cela nous arrivait, on réfléchit à notre petite vie bien rangée.  Avons nous atteint les objectifs qu'on avait ? Serions-nous prêt à faire ce sacrifice ? Je vais m'arrêter là pour les questions même si d'autres fleurissent déjà dans ma tête et que je pourrais vous en parler pendant des heures.

"est-ce que trente-cinq minutes ça suffit pour tomber amoureux d'une femme

ou retomber amoureux

est-ce que j'étais amoureux d'elle à l'époque

est-ce que j'avais une subjectivité à l'époque

est-ce que j'étais vraiment un être humain à l'époque"

La particularité de ce roman est qu'il est écrit en vers libre. Ce n'est pas le premier du genre mais pour ma part je n'en avais jamais lu. Au début j'avais quelques appréhensions. Vais-je adhérer à ce style ? Vais- je le comprendre ? Apporte-t-il vraiment quelque chose de particulier ? Et bien la réponse est oui. Le lecture est plus dynamique, lyrique et indescriptible. On se laisse bercer par les mots comme envoûté, ils nous enlacent, nous transportent, nous caressent. L'écriture de Clémentine Beauvais n'est alors que douceur et musicalité. La lecture devient visuelle, les mots prennent la forme des dires de l'auteur. Je vous laisse quelques images pour vous en montrer la beauté.

Je ne comprends pas pourquoi ce roman est classé dès 13 ans et au rayon jeunesse. Je ne sais pas si je l'avais lu 4 mois plutôt, j'aurais compris toutes les subtilités de l'amour que cherche à évoquer Clémentine Beauvais. Je pense que si on a pas une certaine maturité ou sensibilité à l’égard de l'amour, le roman peut vite devenir ennuyant. L'histoire paraîtra niaise, sans action et conduite par des adolescents bourrés d'hormones.

Un roman unique, magique que je conseille à tous les romantiques et pas qu'à eux d'ailleurs. A tous ceux qui sont tombés amoureux. Un coup de cœur que dis-je un coup de poing qui va mettre longtemps avant de disparaître.

"et je suis sûre que parmi vous,
il y en a qui pensent,
parfois à des amours gâchées
il y a deux, trois ou dix ans.
Ce n’est pas pire après dix ans,
ça n’augmente pas nécessairement avec le temps, 
ce n’est pas
un investissement,
le regret"

Pauline